À l’origine de ce numéro, était posée une triple interrogation autour des programmes : comment les enseignants de français s’approprient-ils les programmes pour mettre en œuvre des processus d’apprentissages au sein de la classe ? Cette cohérence a-t-elle du sens pour les élèves ? Quels programmes l’Institution propose-t-elle dans le cadre des nouvelles réformes tous degrés confondus ? À l’arrivée, la rédaction livre un passage en revue méthodique et analysé de tous les dispositifs qui renvoient la construction de compétences mal définies à l’extérieur de la classe et de la discipline (à travers 18 fiches qui présentent et commentent les dispositifs en vigueur). Elle interroge la manière dont ce morcellement, idéologiquement pensé, justifié et programmé, met à mal les approches didactiques et pédagogiques de la construction des savoirs et savoir-faire. Sans, pour autant, renoncer à des propositions de dispositifs d’apprentissage, au collège et au lycée.
Le numéro est disponible aux Presses du Septentrion.
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Sommaire
La jungle des dispositifs / M.-M. Cauterman, B. Daunay 9
La jungle en fiches / La rédaction de Recherches 25
Programme, progression : la table des matières d’un manuel / F. Darras 65
Q
uand les élèves de lycée réfléchissent au programme… / C. Mercier 69
Le « descriptif » de français / N. Denizot 95
Programmer les TICE en Français : de l’utopie pédagogique au réel de la classe / C. Charlet 115
Hors programme / M. Beauvois 127
U
ne année, deux professeures de français / S. Dziombowski, S. Michieletto 141
Projet de réussite programmée / P. Heems 153
O
rdre de l’homogène et cohérences dans la diversité / É. Nonnon 161
Des nouvelles du livre pour la jeunesse : Télévision, jeux télévisés et téléréalité / É. Vlieghe 193
Éditorial
Au commencement, cela avait pris l’allure d’un numéro sans histoires : il s’agissait de construire une problématique sur le travail en amont de la classe de français, c’est-à-dire le travail fait par l’enseignant pour la conception et la planification de ses contenus et objectifs, avec ses choix didactiques et pédagogiques, ses prises de décision dans la répartition et la gestion du temps. Le questionnement portait sur l’ajustement entre programmes, programmations, progressions, et son inscription dans la dynamique d’une classe et de ses élèves. Au centre, était l’interrogation sur les points de rupture ou au contraire les ponts éventuels entre le sens mis à cette cohérence, d’un côté par l’expert (l’enseignant), et de l’autre par l’apprenti (l’élève). Une problématique somme toute conforme à la ligne éditoriale de Recherches. […]
Dix ans après un numéro consacré à l’image, Recherches s’intéresse plus particulièrement à l’image cinématographique. Cet objet d’enseignement n’est pas ici posé d’emblée comme légitime dans les classes de français : la question didactique du statut du cinéma (discipline afférente ou à part entière ?) est incontournable. Néanmoins, le cinéma est entré dans les classes de français. Qu’on y analyse des films ou que l’on parte de ceux-ci pour faire du français, il s’agit d’envisager des dispositifs d’apprentissage qui amènent l’élève à se départir d’un rapport à l’image qui irait de soi et à se construire des clefs pour un regard plus éclairé sur l’image comme sur le texte. Le numéro fait état de ces propositions, au collège comme au lycée. Et quand les élèves font leur cinéma, c’est à une réalisatrice de témoigner.
Pour ce 50e numéro, Recherches interroge les continuités et les ruptures dans l’enseignement du français. À l’heure de la suppression programmée des RASED, l’institution multiplie les injonctions et les outils visant à faciliter le suivi de l’élève. Mais qu’en est-il dans la réalité de la classe ? Du point de vue de la discipline d’abord : il s’agit d’interroger l’illusion continuiste que donnent les programmes actuels de la discipline français et de ses objets, en réalité multiformes. La question est abordée également du point de vue des élèves et de leurs acquis, eux aussi fluctuants : comment alors tenir compte de la nécessité de ménager des transitions sans nier les ruptures, elles aussi essentielles – de la maternelle à l’université ? Comment faire en sorte que ces individus, réunis au sein de ce qui est appelé « une classe », se constituent en collectif d’apprentissage ? Qu’en est-il du regard de l’élève ? La question est ensuite envisagée du point de vue de l’enseignant lui-même qui n’est pas épargné par les ruptures dans sa vie professionnelle. Enfin, l’Institution dans son ensemble est en jeu : comment prend-elle en charge les élèves qui sont trop tôt tentés de quitter la classe ?
Le numéro s’intéresse plus particulièrement aux difficultés d’apprentissage en français liées à la dyslexie et à la dysphasie. L’accompagnement des difficultés engendrées par ces handicaps appelle une réponse qui ne peut pas être seulement pédagogique, mais qui doit être élaborée en partenariat avec d’autres champs professionnels comme le social, la santé ou l’éducatif, pour que soient conjuguées les aides apportées. C’est donc un numéro polyphonique que nous proposons, avec des approches pluricatégorielles du trouble. On y trouvera la voix d’un parent d’enfant porteur de dysphasie, celles de jeunes adultes dyslexiques, celles de professionnels de la santé. Feront écho à ces approches des analyses et des propositions pédagogiques.
Le numéro se penche sur une problématique récurrente. Sujet traditionnel de polémiques et d’injonctions institutionnelles idéologiquement marquées, cette problématique est aussi une préoccupation constante pour l’enseignant. Loin des discours simplificateurs, il s’agit d’abord d’interroger une norme qui ne va pas de soi. Cela conduit à prendre en compte le rapport des élèves à leur propre langue non pour la dénigrer mais pour aider les élèves à objectiver des pratiques linguistiques plurielles. Cette démarche réflexive sur la langue a aussi le souci de donner du sens à l’enseignement de la grammaire. Elle postule que développer la curiosité et la réflexion métalinguistiques est une condition indispensable pour la maitrise de la langue. Les analyses et les démarches s’intéressent aux divers aspects concernant l’enseignement et l’apprentissage des questions de langue, du primaire au lycée en passant par le collège. Un article présente une réflexion issue de lectures théoriques ; un article et une bibliographie fournissent également des pistes pour travailler avec les livres qui mettent la langue en jeu(x).
Enseigner est un métier, à n’en pas douter, mais enseigner le français ? La spécificité disciplinaire change-t-elle le métier ? C’est la question que veut poser ce numéro de Recherches en interrogeant la manière dont vivent leur métier les enseignants de français que sont les instituteurs ou institutrices, les professeur-es des écoles, les professeur-es de français du collège et des lycées. La particularité de ce numéro est d’approcher le métier en tant que tel, avec ce qu’il donne à vivre en termes d’activités didactiques, pédagogiques, administratives, institutionnelles, mais aussi en termes d’identité et de rapport au travail. Il s’agit de donner à voir comment le métier est vécu par certains de ceux qui le vivent sans dogmatisme et surtout sans nostalgie, mais au contraire avec la volonté de montrer des facettes diverses du métier quand il se vit au quotidien, par des réflexions générales, des analyses et par la présentation d’activités de « français » (qu’elles soient disciplinaires ou transdisciplinaires).
C’est loin des polémiques que le numéro envisage la littérature comme objet d’enseignement. Il s’agit dès lors d’interroger les enjeux et les modalités de la construction du sens. Quelle relation se construit entre l’élève et le livre et comment se construit-elle ? Quels dispositifs d’apprentissage mettre en place pour une pédagogie de la réception littéraire qui tienne compte de l’étrangeté de cet objet pour les élèves ? En quoi l’intertextualité peut-elle favoriser cette réception ? Quelle place pour l’écriture d’invention dans l’approche de l’œuvre littéraire ?
Le numéro s’intéresse à un objet, en apparence consensuel du primaire à l’université, mais qui recoupe des réalités multiples, disparates et parfois discutables. Loin d’être récente, l’écriture de soi semble s’être généralisée au gré des instructions officielles avec des finalités et des modalités différentes.
Le numéro pose la question de l’intérêt de l’outil informatique dans les pratiques professionnelles de l’enseignant de français. Enseigner avec l’ordinateur, c’est à la fois utiliser un outil supplémentaire et, dans un même temps, démystifier la place de cet outil dans les représentations des professeurs, des élèves et de l’institution. Il s’agit donc d’interroger les apports de l’ordinateur sur un plan didactique et pédagogique. Quelle place pour lui dans la classe ? En quoi l’ordinateur modifie-t-il le rapport de l’élève aux apprentissages ? L’ordinateur peut aussi modifier le lien de l’enseignant à sa pratique. Qu’apporte-il en matière d’écriture professionnelle ? En quoi influe-t-il sur l’identité professionnelle de l’enseignant ? L’entrée de l’ordinateur dans les classes pose enfin la question des nouveaux rapports qui peuvent s’instaurer entre l’école et les parents.
La question des enjeux du français n’est pas nouvelle à Recherches, elle est au cœur de nos préoccupations depuis la naissance de la revue et oriente notre réflexion et nos propositions. Le numéro revient de manière explicite sur les problèmes professionnels posés par l’enseignement du français. C’est la définition même de la discipline qui est ici interrogée. Elle pose bien sûr question à la didactique et à l’Institution. Elle fait aussi le lit de réactions conservatrices, qu’elles se retrouvent dans la presse ou, plus scandaleusement encore, dans des propositions parlementaires. Loin de la logique de ces discours réactionnaires, des enseignants témoignent de l’aspect composite, multiréférentiel de la discipline et/ou proposent des dispositifs qui mettent en jeu ses enjeux : au primaire, au collège, au lycée, à l’IUFM, mais aussi en prison.
Les opérations de classement font partie des pratiques quotidiennes spontanées de l’enseignement du français. Il s’agit ici d’interroger ces classements proposés aux élèves comme objets de savoir et leurs dérives normatives. La notion de typologies de textes est-elle dépassée ? Quel statut scolaire accorder aux catégories grammaticales ? Quelles représentations ces habitudes de classements induisent-elles chez les élèves ?
Entre les traces écrites de l’enseignant et celles conservées et/ou produites par les élèves, quelles traces cognitives des apprentissages effectués ? Le numéro pose la question du statut de la trace de l’élève dans l’univers scolaire. Quelle place pour les traces écrites des élèves ? En quoi ces écrits portent-ils des traces de capacités cognitives ? Des propositions pour accorder à ces traces une véritable fonction dans les apprentissages en primaire, en UPI, au collège, au lycée, ainsi que dans le dialogue professeur-élève. Il s’agit aussi d’interroger le rituel de la trace écrite dans le cahier de l’élève, dans le manuel et au tableau. Enfin, le numéro s’intéresse aux traces des apprentissages dans les évaluations au collège et au lycée.